JOURNÉE 1 :
8h30 : 2012, on prend (presque) les mêmes, un shaker, on mixe le tout et voilà un nouveau cru aussi frais que le Beaujolais ! Cette année, l'action se déroule à Arcueil, ce qui ménage nos narines et notre sensiblerie, vu qu'il n'y a que la rue à traverser avant d'atteindre ces magnifiques bâtiments colorés (jaune, bleu, violet). Osons le dire: je n'ai croisé presque personne. Que sont devenus les gens ? La semaine de révisions en aurait donc tué quelques uns ? Morts ensevelis sous les posts-its ? Endormis devant un documentaire sur la reproduction des mygales d'Amazonie ? En train de vomir leurs tripes parce qu'ils regardent les 10 pires cadavres retrouvés sur l'Everest ? Etouffés par un spéculum parce qu'ils voulaient voir comment ça marche ? Ou juste ... fatigués ? (si tu as une kassdédi : estime-toi heureux.)
8h45 : il fallait une idiote qui se trompe d'étage. B6, c'est bâtiment B, 6e étage. Après avoir fait le tour du 5e, l'évidence s'impose; il faut aller plus haut (non, ne chantez pas). Décidément, les chiffres et moi...
8h50 : On me demande si je ferai ma chronique. Toujours à votre service.
8h52: Je m'installe. Trousse jaune, porte-bonheur japonais et marocain au fond du sac, pom'potes et eau pour survivre en cas d'attaque terroriste / d'incendie / de faim tenace. Je suis prête.
8h53 : c'est beaucoup moins drôle d'être dans une salle de 100 que dans un hangar de 2000. L'an dernier, on sentait mieux le stress, ça faisait plus film américain pourri. Là, ça fait ... bah ça fait rien.
9h04 : le sens du timing transcende les années. Et ça, c'est beau.
9h04 toujours : Je ne sais pas encore lire à l'envers. Il me reste cinq épreuves pour développer un regard de Superman. Baudelaire, Ecrits sur la littérature : "La poésie est essentiellement philosophique, mais [..] elle doit être involontairement philosophique."
9h05 : Pourquoi ? Pourquoi tant de haine ? Pourquoi nous faire souffrir autant ? POURQUOI ?
9h06 : Et puis d'abord, c'est quoi la philosophie ? Je m'appelle pas Heidegger.
9h07 : On va dire que je maitrise Baudelaire. C'est mon besta tu peux pas test. True story.
9h30 : Mes idées sont dans la poche.
10h00 : ainsi que le plan.
10h30 : et l'intro. Tout est possible, tout est réalisable, c'est le jeu de la vie. Phrase philosophique, si je la mettais en rimes ? Je pourrai m'auto-citer : "Comme l'affirme la célèbre M....." CLASSE. Ou pas.
11h00: Et désormais; le plus impressionnant, le plus beau, le plus incroyable : je rédige.
11h02 : Mais avant, petit regard circulaire sur mes voisins. Ma voisine de devant en diagonale a une tête de peste. En plus elle se fout de la gueule de la surveillante (une dame avec des grosses lunettes façon Trelawney et un pull rose de toute bôté). Mais bon, ça c'est drôle.
11h05 : les premiers peuvent partir, mais personne ne part. Est-ce une cuvée de génies prométhéens ? (c'est le moment d'admirer ma capacité à ressortir les thématiques d'Alcools et de La recherche de l'absolu. car oui, j'ai tout cité, même Balzac.)
11h06 : Au fond, rien ne m'oblige à rédiger. Si je veux passer ma vie à manger des chamonix (j'en mets partout, mes copies vont encore être le reflet de mes encas ) et des pom'potes, je peux. Et c'est volontairement philosophique comme attitude. Baudelaire, in your face.
12h15 : Quand même, une désespérée. Je commençais à douter d'être à un concours. (moi, méchante ? Jamais.)
12h30 : et bien, j'ai officiellement fini mes deux premières parties et il me reste plus de deux heures. j'écris beaucoup trop vite et j'ai de l'encre partout. "Smart is the new sexy", on se motive comme on peu, car j'ai l'air d'une écolière perdue au milieu de la dictée faite par Prosper Mérimée à la demande de la femme de Napoléon (75 fautes pour l'empereur, 24 pour Dumas fils... Outch. C'était la minute culture.)
13h00 : j'attaque la troisième partie après relecture attentive et soulignage appliqué des titres. si, ça demande beaucoup de concentration. Si.
13h45 : C'est la fin. Mais hélas, on ne peut pas écrire 'The END" sur nos copies. ce serait pourtant jouissif.
14h00 : une heure d'avance, j'attends en dégustant des chamonix, encore et toujours. Non, je suis pas encore obèse. Pas encore...
14h12 : après avoir appelé la prof pour lui donner le sujet ("Hmmm, bien dans leur délire de mettre des trucs en rapport mais sans rapport en même temps". (Oui, je vous donne la substantifique moelle de son propos)), m'être gelée le temps de mettre un pull en plus (c'est quoi ce temps de merde, sérieux ?), de retour vers Laplace.
15h20 : RER, métro, déjeuner... et je me motive sur Americano pour la philo. Oui, quel sens de la rime et de la poésie (huhu). À demain pour de nouvelles aventures ... philosophiques !
JOURNÉE 2 :
8h45 : Je m'installe, au bon étage cette fois !
8h58 : Tout le monde est prêt en B6, un lourd silence s'installe.
8h59 : Très lourd.
9h00 : Trop.
9h03 : "procédez à la distribution des sujets" : le surveillant général lève les copies comme une offrande aux dieux. La moira s'abat sur nous, trop tard pour changer le fatum commun. Si nous avions su... Au fond, ils auraient pu mettre "Toute philosophie est-elle poétique ?" Au moins, nous aurions ri.
9h04 : Qu'est-ce qui est hors la loi ?
9h05 : Quelque part, je remercie Lucky Luke d'exister, il fera mon introduction. Vive le Far West, vive Mesrine l'ennemi public numéro 1 ! Non, je rigole, je ne suis pas folle à ce point-là.
9h10 : Certains jours, je me demande ce que je fais là. Pourquoi je suis là.
10h10 : Ne jamais se laisser abattre. Telle est la devise qui me donne la joie d'avoir mes auteurs et mon plan.
10h45 : L'introduction elle, refuse de lâcher prise. Je la menace d'un passage par la case prison. Car oui, penser au Monopoly peut aussi aider. Quand on fraude les impôts, c'est hors la loi. Huhu, j'ai trouvé une distinction entre le criminel et le champ d'application de la puissance législative, je suis heureuse.
11h00 : Après la dégustation d'une merveille culinaire qu'est le biscuit Pick Up (j'aime avoir des biscuits qui font un maximum de bruit quand on les ouvre), je commence.
11h05 : ma voisine de devant s'en va. Goodbye my friend...
11h30 : Cette fucking introduction n'a pas résisté. Enfin.
11h31 : C'est quand même jouissif de citer le Far West dans une copie de philosophique en espérant, que bon, ça passera.
12h15 : ma première partie est terminée. Un coup de Prométhée et d'Oedipe, les hors la loi favoris des khâgne. Et comme ça, on reste dans la thématique littéraire. Oui, j'en suis fière.
12h30 : j'entame la deuxième partie. La plus longue. Celle ou je parle de l'arrêt de la Cour de Cassation sur "homicide volontaire sur personne morte". Je vous promets que ça existe, et ça faisait très bien dans mon concept du quand-ce-qui-est-hors-la-loi-entre-dans-le-champ-d'application-de-la-loi-puisqu'il-est-l'origine-de-sa-promulgation.
12h33 : je regrette de n'avoir pas le talent d'un certain K. pour les concepts. L'a-légalité, la supra-légalité, ça fait chouette. Congrats.
13h20 : la deuxième partie est évincée.
13h25 : Et voici la der des der, la troisième partie dont les auteurs sont invariables, que le sujet parle de la "puissance du poireau contre la carotte" ou bien des méfaits juridiques d'un trop-plein de chocolat. Rawls, Habermas et Hegel, mes nouveaux meilleurs amis depuis trois mois. Pour ceux que ça intrigue : tout est possible, ne l'oubliez pas. Je ne dévoile jamais mes plans.
13h57 : la 10e personne (à peu près) vient de partir. Des moyens courageux que je félicite quand même.
14h20 : Après avoir commenté à rédiger ma conclusion au feeling, comme je le fais rarement en permanence, je prend ma 6e feuille de brouillon (il paraitrait que mes brouillons ressemblent à un cours d'après les dires de mes camarades). Ca finit souvent sur un délire métaphysique du style "L'ile perdrait alors ce qui constitue son essence: un territoire de tous les possibles." ou alors "Le poète ne doit pas oublier qu'il s'adresse avant tout à des êtres humains, [ses] semblables, [ses] frères." (la dernière est celle que j'ai mise hier. Beau non ?) Mais l'inspiration ne vient pas.
14h21 : Si, c'est bon. Mais j'ai pas réussi à faire dans la beauté métaphysique. Kierkegaard n'était pas dans ma tête sur le moment.
14h29 : Je vais rendre ma copie. Ma convocation a disparu.
14h31 : Grosses lunettes et pull rose, on va pas être d'accord.
14h32 : lunettes de mouche l'a retrouvée. Ouf. Je ne suis plus emprisonnée.
14h25 : Il ne me reste plus qu'à attendre les gens dans un froid glacial... En discutant avec une gentille demoiselle, j'ai découvert qu'il existait des prépas de moins de 20 personnes. Les gens, je vous envie. Il y a environ un tiers de ma classe à qui je n'ai jamais adressé la parole, ou alors involontairement (mais pas de manière philosophique).
18h00 : Une chose est sûre : si nous tombons demain sur l'urbanisme, on aura eu le tiercé gagnant.
JOURNÉE 3 :
8h35 : J'arrive.
8h37 : Je pose mes affaires.
8h38 : Petit coucou à S. une lectrice à quelques tables de moi ! C'est toujours sympa de vous rencontrer en vrai. Les B6, si vous passez par ici, faites-moi signe.
8h40 : Révisions de dates dans l'escalier avec F., il n'est jamais trop tard. Bonjour d'une autre S., venue nous éclairer de son sourire.
8h57: Après l'éternelle annonce, le silence de mort s'installe. Encore looooong.
8h59 : L'offrande recommence, cette fois tête de fouine est morte de rire.
9h03 : Populations, pouvoirs publics et hygiène en Europe de la fin du XVIIIe aux lendemains de la Première Guerre mondiale. Merci de nous avoir évité les femmes, l'urbanisation, l'hôpital ... Et de nous avoir donné un sujet bien large (que nous avions déjà fait quasiment huhu, c'est-à-dire qu'on avait eu "Hygiène et hygiéniste en Europe").
9h30 : mon introduction est jetée sur le papier. Pas de lyrisme. Soyons sobres. Elle vent du rêve.
10h30 : pfiou, le plan au complet. En histoire, on sent le cerveau qui cherche et les neurones qui brûlent.
10h45 : Début de la rédaction. Mon poignet se prépare. Un Pick Up pour se mettre en forme, une gorgée d'eau (c'est dans ces moments-làsqu'on pense au mec de l'agrèg avec ses deux bouteilles de rouge. Où est mon gin ?) et lançons-nous. Autant d'adrénaline qu'un abordage, sauf que les gens dont on parle sont déjà morts.
12h00 : la première partie est là, elle se déroule sous mes yeux dans ses six pages et je trouve c'est mieux que Rembrandt et de Hooch réunis (Balzac représente).
13h15 : la même jeune fille qui part tous les jours à la même heure après ses deux copies doubles part. Serait-ce la même que l'an dernier ? Ce mystère doit être éclairci.
13h16 : Ma voisine en diagonale fait des sous-parties monolithes de deux pages. Le correcteur va mourir.
13h17 : C'est reparti après un Pick Up pour la troisième partie.
13h35 : J'ai mal au dos. Aie.
13h36: En fait, je suis à moitié couchée sur ma table. Failed.
13h37 : Je me frotte les yeux et merde : le crayon noir et le fard à paupières beige sont sur ma copie. Re-failed. Prenons un deuxième Pick Up pour me consoler.
14h30 : Ouh ouh ouh la conclusion !
14h31 : Ah non. J'ai oublié de dire plein de choses. Comment les intégrer ? C'est là que le rêve de l'introduction se transforme en cauchemar.
14h32 : Après "Une semaine pour tout changer", voilà "5 minutes pour rajouter ce que tu as zappé". Mais sans papier peint à poneys violets et autocollants roses sur les murs (j'imagine toujours la tête des gamins un an après la décoration de la-grosse-blonde-dont-je-citerai-pas-le-nom.
14h45: I did it.
14h55 : Maintenant que ma conclusion non métaphysique (nous sommes en histoire, soyons sérieux deux minutes) est torchée, je me suis faite avoir et doit rester. Un gros quart d'heure de relecture m'attend.
15h02 : C'est dingue cette manie que j'ai de barrer les mots et de récrire au dessus au lieu d'utiliser l'effaceur. J'suis un peu con parfois.
15h03 : On se lève (et la marseillaise alors ?
15h05 : LA VOILÀ TA KASSDÉDI LE BLOND ! Et maintenant, tu peux casser le vent, car le matin c'est important. En sortant de concours aussi (d'où le texto ?) Ne vous inquiétez pas, il va se reconnaitre.
18h00 : Je suis au tel avec E., j'ai regardé la moitié de Rien que pour vos cheveux (oui, c'est aussi mauvais que le titre, mais c'est drôle. À la fin, le terroriste devient vendeur de chaussures, et la Palestinienne et l'Israélien se marient et ont beaucoup d'enfants.) et bon, c'est pas que je surkiffe pas la Deutschland mais voyez, penser à Goethe ne me met pas en émoi. Ou alors j'ai dû mal comprendre Werther, et peut-être que quand il pleure devant Charlotte, en fait il y a autre chose. Ou pas. Bonne chance pour les langues ! J'espère devenir bilingue d'ici demain. Dites-moi que vous aussi.
JOURNÉE 4 :
8h40 : L'angoisse, la vraie, ma meilleure ennemie me prend les tripes. C'est l'allemand. Et moi l'allemand, je maitrise pas.
8h45: Bonjour à deux compagnons de combat en train de réviser des fiches d'histoire et de vocabulaire.
8h50 : Après m'être assise, ma voisine me demande si je mange des Chamonix. Bien vu, c'est moi. Mais tu ne me reverras plus jamais de ta vie, c'est fort dommage. À moins que tu ne fasses version + commentaire de grec et spécialité géographie.
8h51: L'éternel petit discours, suivi de son long silence.
8h58 : Je suis très déçue. L'offrande n'a pas eu lieu.
9h03 : C'est parti. Heinrich Heine, Gemäldeaustellung in Paris 1831. Heine, c'est un petit rigolo. Mais dans ce texte, il en a beaucoup moins l'air.
10h30 : Parce que les choses bougent (c'est la minute philosophie du jour), la version cette année est bien mieux.
10h40 : Une rébellion belge ? Mais de quoi ce texte parle ? On devait pas traduire une description de la liberté guidant le peuple ? Hiiik.
11h00 : La version est faite, recopiée au propre.
11h10 : Pause gouter. Je tends de plus en plus vers l'obéisse comme dommage collatéral.
11h20 : Go go go ! C'est pas que je ne sois pas motivée, mais bon...
11h45 : Autant mon introduction est venue sur un coup de bilinguisme soudain, autant là, je n'ai absolument plus aucune idée. Plus de mots. Plus rien. Mon cerveau est en panne sèche.
11h47 : On se reprend.
12h00 : Il me reste trois heures, c'est tout bon.
12h01 : Voilà, tout se remet en marche.
12h36 : Voisine de diagonale me lance des regards sournois. Tu veux ? Une photo dédicacée ? C'est envisageable. Moi aussi je t'aime.
13h30 : Plus que ma dernière partie et la conclusion. Il est fourbe ce Heine. Un coup on croit qu'il adore le peuple, un coup le peuple c'est un ensemble de putes et de voleurs, un troisième coup c'est les aristos les méchants.
14h20 : C'est parti pour la relecture. Ma conclusion fait 5 lignes, pour de l'allemand je trouve déjà ça fabuleux, à la limite de la magie noire.
14h45 : Trousse rangée en quatrième vitesse.
14h46: "Au revoir mademoiselle". Et oui, je quitte la B6 et ses honorables concitoyens.
14h48 : Sortie pile avant le gong.
15h05 : J'attends dehors. les gens devraient commencer à sortir.
15h15 : Pourquoi personne ne sort ?
15h16 : Je rencontre S., dans ma classe en première et terminale S. C'est toujours agréable de voir de vieux compagnons de combat.
15h35 : De désespoir, j'appelle les gens. Tout le monde est dans le RER. Les gens sont sortis par la porte de derrière. je me suis faite avoir. Fuck. Je hais la solitude.
15h45: Je suis à Denfert. Cette conclusion est moins un échec que l'an dernier, mais c'est pas le Graal. En espérant que le grec et la géographie, ce sera mieux.
17h30 : Après avoir eu E. et G. au tel, je regarde Daybreakers. Les vampires règnent sur le monde et les humains vont disparaitre. Du coup, plus de sang. C'est la merde.
JOURNÉE 5 :
8h20: arrivèe à Denfert, je vois les télés avec un afficahe jaune "RER B" Mon sang se glace.
8h20 et quelques dixiêmes de secondes: Je sprinte dans les escaliers pour choper le premier train, avant que la moira ne s'abatte sur moi.
8h21: sauvée. Le sang regagne mes mains et mon cerveau.
8h30: aujourd'hui, il semblerait sue le cru a repris de sa fraicheur après 4 jours de pause révisions assidues comme on pouvait. C'est la feinte : les versions sèches en B, les commentaires en D.
8h35: décidément, il faudrait que je me mette au sport. Porter le Bailly sur 5 étages devrait trouver sa place dans les épreuves olympiques.
8h36: pfiou, les trois dernières marches.
8h37: j'entends des gens discuter. "Ah, dans le commentaire il faut aussi traduire un bout de texte ?" Mon petit, j'espère que c'est une blague. Même ma naïveté (pourtant assez élevée) n'atteit pas ce stade.
8h40: Je m'installe.
8h42: N. Le sent bien sur le monologue d'Ajax de Sophocle. On lit.
8h47: Après utilisation de la vision périscope, il semblerait que nous soyons 36 en grec. C'est la folie furieuse !
8h49: une surveillante veut nous faire ranger les trousses. Sans porte-vonheur à proximité immédiate de ma copie, je meurs. Donc non. Moment de rebellion.
8h50 : les éternelles instructions sont lues.
8h53 : mais le haut-parleur beugue. Ou bien est-ce le monsieur ? Une crise cardiaque donnerait plus de piquant à l'épreuve.
8h57: Il faut AUSSI enlever les post-its qui marquent les lettres. Bon, j'en n'ai pas. Je regarde mes camarades les ôter d'un air rageur. En même temps, le dictionnaire qui se trouve devant moi ne m'appartiens pas. Les tags dedans ne sont pas miens. Je vis depuis trois ans sur un emprunt à taux réduits à T., ce qui m'assure, dans un futur proche, un vide sur l'étagère du bas de ma bibliothèque dans lequel je vais pouvoir ranger la trilogie Hunger Games (lue en une journée et demie, sisi).
9h02: Here we go. Euripide, Cyclope. Un Tragique quoi. Mes meilleurs potes en grec.
10h05: la version est prête dans ma tête. Il faut dire que 12 lignes, ça nous change de l'entrainement de warrior qu'on a eu pendant l'année. Et même pas tarabiscotée la version. C'est le plus beau jour de version de ma vie.
11h00: la version est au propre. Je jette un coup d'oeil à N. (d'H4 en version/commentaire de grec on est les seuls), plongé dans la lecture du Bailly.
11h45: ça y est, j'ai le plan et l'introduction.
11h46: pause déjeuner. Pompotes et Coqueline Trois Chatons. Ma voisine de droite semble avoir un sandwich jambon/beurre en sa possession. Je le veux !
13h30 : j'attaque la troisième partie du commentaire. Mais avant, une pause s'impose. Et il faut que je lorgne un surveillant pour avoir une copie en rab.
13h33: Got it. Le monsieur me demande si une comie suffira. Tkt mec, c'est du grec. Pas de la philosophie poétique. Je saurai me maitriser.
14h07: c'est la minute cruciale. La conclusion d'inspiration métaphysique.
14h08: tu seras ou tu seras point.
14h09: on vire dangeureusement vers la deuxième solution.
14h25: Le virage a été détournée, je m'en suis sortie.
14h30: Je rends ma copie, et le sujet. Ils sont étranges quand même de demander le sujet une demi-heure avant la fin. Quoique pour les versions, je peux comprendre. Mais en histoire, c'est pas la dernière demi-heure qui va chabger ta copie et faire de ta problématique une rrvolution dans le monde de la recherche historiographique contemporaine.
14h31: "Il ne faut jamais écrire en rouge dans une copie mademoiselle." LOL. J'ai mis la pagination en rouge, comme l'an dernier, comme toutes mes copies. Et ma copie n'a pas pour autant une tronche d'arc-en-ciel sanguinolent (j'aime mes métaphores).
23h00 : Je vais dormir. Géographie demain, ça va être douloureux, je le sens. Mais les iles comme thème, ça donne au moins des idées de destination de vacances.
JOURNÉE 6 :
7h30: On se lève pour le der des der, la vraie de vraie puisque je ne ferai pas une quatrième année.
8h35: Encore au premier rang ! Décidément, je suis condamnée.
8h36: Finalement, je me rends compte que je peux étendre mes jambes sans gêner personne (bon, si je fais tomber un surveillant ce sera même un peu drôle).
8h37 : Mieux que les porte-bonheurs, la trousse tigre pour ranger les crayons de couleur. Car la géographie, c'est du coloriage avant tout!
8h45: Le chef de salle tente de dire quelque chose au micro. On se croirait à la poste. On comprend rien.
8h46: Il s'évertue à nous dire des choses que nous savons déjà. Il doit être noveau le pauvre. Contrairement à nous. Un ou deux ans d'expérience, un concours ne s'oublie pas.
8h50: Je profite du aut-parleur qui beugle ses instructions par intermittence (oui, le micro inter-bâtiments a décidé de faire la fête hier soir, forcément ce matin il avait la gueule de bois et était aphone par moment. Ce qui a eu le mérite de détendre l'atmosphère) pour tenter de repérer des compatriotes. Je suis bien entourée, je pense m'en sortir psychologiquement.
8h51: Franchement, mes voisins ont l'air plus sympathiques qu'aux épreuves précédentes.
8h55 : Le chef de salle nous répète ce que le micro nous disait déjà. Pitié.
9h01: "Habiter une île".
9h02: J'aurais vraiment dû élire le corrigé sur "Vivre dans une ile". Certes, il était mauvais. Mais c'était toujours ça.
10h30: le problème de la géographie, c'est qu'entre la dissertation et les schémas, c'est une véritable course contre la montre. Le compte à rebours est lancé, j'ai quatre heures et demies.
11h45: Ma première partie est finie, agrémentée de deux beaux schémas. Enfin, JE les trouve beaux.
11h46: Un coup d'oeil à la copie de mon voisin: mandieu, il écrit ses titres dans sa copie ! Je pensais que c'était rédhibitoire. Il faut croire que non. Par contre, ses schémas vendent du rêve. Précis, pleins de couleurs (pas une touche de blanc). J'admire.
12h30: J'en suis à la moitié de ma deuxième partie. Je m'accorde une rapide pause goûter, mais genre hyper rapide.
13h40: J'aborde la troisième part métaphysique de ma dissert. La partie commence à se corser sérieusement entre la géographie et moi.
14h59: Ouf, dernier mot de ma conclusion. Je l'ai échappée belle. Mais pas le temps de relire.
15h20: Kassdédi au Normand qui compare sa copie à un soufflé. Un SOUFFLÉ. Je vois plus ça comme une partie de Tétris. Caser le plus de choses possibles dans le moins de pages possible en essayant de gagner des points.
22h00: Après être allée voir Le Prénom (c'est vraiment très drôle comme film, je vous le conseille) et être allée diner au jap, je me rends compte que c'est fini. Trois ans de prépa, trois concours. Vendredi, entretien Sciences Po. Et puis après, je reprends les cours, la routine recommence. Verdict le 7 juin. Quoiqu'il en soit, cette expérience va me manquer. Bonnes vacances (aussi) !